Nord du Chili : du Pacifique au désert d'Atacama
À l’assaut des Andes
De Calama, capitale minière du pays, il ne faut guère plus d’une heure pour rallier San Pedro de Atacama par une route goudronnée lancée à travers des paysages d’une grande stérilité. Nous faisons route, au volant d’un pick-up, jusqu’au hameau de Chiu-Chiu, assoupi autour d’une attachante église à la charpente et aux portes en bois de cactus.
En toile de fond, les sommets enneigés annoncent un monde nouveau, andin. La piste, d’abord rectiligne, se met à sinuer, puis se cabre. Passé 3 000 mètres, les premières touffes d’ichu (une graminée) apparaissent, un peu plus vertes que jaunes grâce aux récentes pluies. Corollaire de l’ichu : deux vigognes montrent bientôt le bout de leur joli minois. Au fil de la montée, d’autres animaux surgissent d’entre les pentes pelées et les cailloux. Ils nous accordent un regard, parfois deux, dépliant leur long cou gracile et faisant frétiller les cils soulignant leurs grands yeux noirs en amande.
Un nouveau chaînon franchi, un panorama grandiose se déroule devant nous : la barrière des Andes dans toute sa splendeur, saupoudrée de neiges pas toujours aussi éternelles que l’on voudrait le croire. Des nuages noirs jouent avec les crêtes, les enrobent, les recrachent, laissant briller un instant le soleil sur l’altiplano frigorifié. L’hiver, ici, le mercure chute à -15 °C, -20 °C. Un moment sublime, affirme le garde de la réserve, en poste à l’année — moment où les corolles des fumerolles et les geysers, revigorés par l’amplitude thermique, s’élèvent plus haut, plus beaux.
Même en cet après-midi d’été, le spectacle est étonnant. Sourdant de terre, l’eau frémit en résurgences bouillonnantes, en fontaines infatigables, ou s’étale en grands bassins limpides et immaculés aux reflets bleutés. Plus loin, plus bas, les forges terrestres chauffent d’autres piscines naturelles, comme celles de Puritama, où l’on se laisse glisser entre les ajoncs (33,5 °C aujourd’hui).
Texte : Claude Hervé-Bazin
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