À Prague, sur les traces de Chatwin
Rabbi Löw
L’une des façades de l’immeuble longe le cimetière juif, donnant directement
sur ses tombes enchevêtrées, vision saisissante (que l’on ne peut avoir, ailleurs,
que des toilettes du musée des Arts décoratifs sur la place Jan Palach !).
Au loin, derrière la Vltava, c’est le Château de Prague, majestueux et inquiétant
à la fois. Deux lieux emblématiques de Prague, mais aussi du roman. Deux symboles
se résumant à deux personnages : Rabbi Löw, chef légendaire de la communauté
juive de Prague et Rodolphe II, chef du saint empire romain germanique.
Contemporains de la fin du XVIe siècle, les deux hommes évoquent
l’un des âges d’or de Prague. Sous le règne de Rodolphe II, les Juifs bénéficient
d’une grande liberté. Ce Habsbourg hors norme, le seul à avoir gouverné depuis
Prague, s’intéresse plus aux kabbalistes et aux alchimistes qu’aux conquêtes.
Mécène, il s’appliqua à acquérir petit à petit les plus grandes œuvres de son
temps. Aujourd’hui encore, on peut admirer les restes de sa précieuse collection
de tableaux à la galerie du château, du moins ce qui a pu échapper aux nombreux
pillages consécutifs à la guerre de Trente Ans (1618-1648).
Plus créateur que collectionneur, le Rabbi Löw fut surtout un éminent kabbaliste,
connu pour avoir donné vie au Golem, sorte de Frankenstein avant la lettre !
Un soir, il oublia de lui enlever le Chem (symbole de vie) et le monstre d'argile,
devenu fou, déambulait dans les rues de Prague, brisant tout ce qui se trouvait
sur son passage. Une légende bien sûr, mais sacrément ancrée dans l’histoire
de la ville. Si vous visitez la synagogue Vieille-Nouvelle, on vous montrera
peut-être l’endroit où le Rabbi fabriqua le Golem... Vérité et légende se
mêlent inextricablement, dans le roman comme dans la ville...
Texte : David Alon
Mise en ligne :