La Bourgogne souterraine, comme au ciel
Le château de la Cristallerie, au Creusot
Racheté dans les années 1900 par Charles Schneider, baron de l’acier et fondateur du Creusot (qui faillit s’appeler Schneiderville), le château de la Cristallerie constitue un des plus beaux fleurons de ce qu’on pourrait appeler l’art paternaliste du début du XXe siècle.
À l’époque, on naissait et on mourait Schneider, de la maternité à la maison de retraite. Dans l’église, les représentations du patron et de sa femme sont plus grandes que celles de Dieu.
Parce qu’il ne supportait pas l’idée que les grands de ce monde qui le visitaient puissent croiser ses domestiques, il fit construire des souterrains sous son château pour leur permettre de se déplacer sans être vus. On parle d’un réseau de plusieurs dizaines de kilomètres, mais il n’en existe aucune topographie précise.
Au détour d’un couloir, on tombe sur une salle des machines improbable, dont les manettes chromées, les boutons de cuivre et les plaques en émail servaient à éclairer la scène du théâtre à l’italienne située juste au-dessus. Et puis, les loges des artistes, dont celle de Sarah Bernhard, une habituée du château, équipée d’un grand placard permettant à l’actrice de ranger le cercueil dont elle ne se séparait jamais. D’aucuns prétendent qu’à la nuit tombée, on entend parfois claquer sa jambe de bois sur le ciment des couloirs.
Texte : Laurent Boscq
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