On se croirait presque en vacances !

Au matin du dixième jour, nous prévoyons une journée farniente. Depuis le gîte du col de Vizzavona, nous nous rendons à Ajaccio, le temps d'une baignade. L'occasion d'un trajet en train. La micheline est une expérience à ne pas rater sur l'île. Un vrai régal de circuler dans cet engin d'une autre époque. Un voyage au rythme des troupeaux qui traversent la voie : très lent ! Puis nous reprenons la marche. Les étapes se succèdent et ne se ressemblent pas. Chaque jour est l'occasion de nouvelles découvertes. Bergerie typique ici, piscine naturelle là, photo par-ci, plongeon par-là, mouflons ici et là. Soudain, un souvenir me revient, celui de ces quelques lignes couchées sur le livre d'or d'un des refuges : « Je suis venu, j'ai vu, j'en ai plein le c… ». Certes nous sommes fatigués, mais la mécanique est rodée. Nul besoin de réfléchir, il faut juste avancer et pour cela, rien de tel que de mettre un pied devant l'autre. Le teint est halé, la peau patinée, les formes redessinées.

La treizième étape entre Usciolu et Asinau est la plus longue du GR. Plus de huit heures de marche en ce qui nous concerne. Après un déjeuner typique et copieux chez Jacquot, l'ascension du Monte Alcudina (2 134 m, point culminant de la Corse du Sud) est fort pénible. Mais quel point de vue !

L'avant-dernier jour, nous choisissons de passer par la variante des Aiguilles de Bavella, un peu plus sportive, mais réputée pour ses paysages à couper le souffle. La montée dans les pins sera fastueuse, la récompense généreuse. Flammes de pierre dressées, faune sauvage perchée, nous nous sentons revigorés. La dernière étape enfin est l'occasion d'une ultime baignade dans un torrent (et d'une ultime plaisanterie entre randonneurs, puisque l'une d'entre nous retrouvera une pierre dans son sac à l'heure du déjeuner). Au fur et à mesure que nous redescendrons dans la vallée, l'air va se faire plus lourd. Finie la brise d'altitude qui rend supportables les températures estivales. Là, nous traverserons quelques hameaux. Les sources et les châtaigneraies se rencontrent à mi-flanc de la montagne ; attirées l'une vers l'autre, la source descend des sommets, la châtaigneraie grimpe depuis la vallée et de leur union naît le village corse et ses vieilles maisons, toutes identiques. Soudain, les odeurs viennent nous chatouiller les narines. Nous progressons dans un dédale de fleurs. Nous traversons des jardins. C'est l'ultime descente vers Conca.

Nous avons relevé le défi, mais avant tout vécu une belle aventure humaine pleine de découvertes. On s'est attaché aux éléments, on a respiré avec eux ; le retour va être brutal. Parfois, la Corse semble avoir été inventée pour le tourisme tant elle s'y prête bien. Mais je m'arrête là, car en parler, c'est bien, y aller, c'est mieux.

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