Irak : l’histoire pour enjeu

Les enjeux culturels de la guerre

L’approvisionnement illégitime des musées occidentaux
 
La guerre du Golfe de 1991 a déjà vu le pillage, non seulement de sites, mais de musées. C’est ainsi que plus de 4 000 objets archéologiques répertoriés ont été volés dans les musées irakiens. Un catalogue officiel de ces objets les répertorie. Rares sont ceux qui ont refait surface. Mais ils ne sont certainement pas tous aujourd’hui aux mains de collectionneurs privés peu scrupuleux. En 1999, une de ces pièces est réapparue, mais dans un musée américain, le New York Metropolitan Museum ! Intégrée dans la collection, cette petite statuette en bronze provenait en fait du musée archéologique de Kirkuk et figurait dans le catalogue des objets manquants. Le musée de Kirkuk attend toujours sa restitution.
Un discours d’une nature particulière commence à émerger à Bagdad. Certains dignitaires, pas seulement dans l’archéologie, mettent en avant un appétit particulier des Américains pour leur patrimoine, en plus de leur appétit pour le pétrole. Il serait tentant de rejeter en bloc ce fort soupçon irakien, puisque provenant du gouvernement. Toutefois, il est possible de retrouver quelques éléments allant dans ce sens, et provenant... des États-Unis ! La revue hebdomadaire The Art Newspaper de novembre 2002 a publié un article intitulé Iraq’s history is our history too. Il est possible d’y lire que l’association américaine « American council for cultural policy » offre son aide aux futurs institutions irakiennes libérées, pour reprendre des fouilles plus efficaces et avancées technologiquement. Le sous-titre de l’article est Archeologists and lawyers are urging the US government to take account of historic sites in Iraq as the military draws up its strategy, à savoir : Archéologues et avocats [que vient faire ce corps de métier dans des préoccupations archéologiques ? Ndlr] pressent le gouvernement américain de prendre en compte les sites historiques en Irak dans l’élaboration de leur stratégie militaire. Cette préoccupation est tout à fait louable, mais on peut aussi s’interroger sur le bien-fondé de la préoccupation américaine pour l’archéologie irakienne, malgré la bonne volonté affichée. La réaction de ces archéologues et avocats américains ne se fait peut-être pas que pour le respect d’un patrimoine mondial. Bien que le New York Metropolitan Museum soit un musée hautement respectable, il est utile de préciser que l’American council for cultural policy a été fondé par l’ancien avocat dudit musée...
 
Le paradoxe des origines
 
Il est désormais de notoriété publique que George Bush a introduit la religion à la Maison Blanche, comme aucun président américain avant lui. Les conseils des ministres ne commencent-ils pas désormais avec une prière ? N’a-t-il pas conseillé à certains de ses ministres de prendre des cours de religion ? (source : AFP, datant du 03/02/01.) Bush a fait directement intervenir Dieu dans plusieurs discours, notamment concernant l’Irak. Vis-à-vis de la population puritaine américaine, c’est une façon efficace de légitimer son intervention. Le paradoxe est que la foi de Mr Bush découle de la Bible, alors que de fameux passages de l’Ancien Testament proviennent de légendes mésopotamiennes. L’exemple le plus connu concerne le déluge, avec Noé et son arche : l’Épopée de Gilgamesh contient une version primitive du déluge biblique. Le paradis (Genèse 2, 10) est situé en Mésopotamie, entre le Tigre et l’Euphrate. Impossible, dans ces conditions, de ne pas envisager que Bush pense, en partie, en termes de croisade. Loin d’être une lecture partisane de faits avérés, ces éléments sont troublants. Il faut aussi se rappeler que Babylone, la cité de tous les péchés dans la Bible, est devenue symbole du Mal. La foi conservatrice de George Bush et de ses lieutenants ne peut avoir occulté ce fait, consciemment ou non. Vue ainsi, la guerre ne sert pas seulement à faire tomber un dictateur et écarter une menace « mondiale ».
L’Irak est une terre trop chargée d’histoire et de symboles pour ne pas déclencher de nombreuses réflexions sur une multitude d’autres notions. Le peuple irakien, indépendamment de ses dirigeants sanguinaires, n’en sera pas à la première guerre de son histoire.

Texte : Thibault Pinsard

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