Cosmofobia
Auteur : Lucia Etxebarria
Editeur : Éditions Héloïse d’Ormesson
385 Pages
Lavapiés, vous connaissez ? Entre la Puerta del Sol et la gare d’Atocha, ce quartier cosmopolite est l’un des plus sympas de Madrid. Il y règne une atmosphère quasi villageoise, menacée par la spéculation immobilière. On connaît la chanson... Lavapiés, c’est un peu le Belleville de Madrid. Un quartier popu et branché à la fois, où résident immigrés et bobos ainsi que la nouvelle coqueluche de la littérature espagnole, Lucia Etxebarria, auteur de Amour, Prozac et autres curiosités, et dont le dernier roman Cosmofobia vient d’être publié en France.
Lavapiés, à travers ses habitants, est aussi le personnage principal de cet ouvrage truculent et doux-amer. Vivant, mais aussi désenchanté, Cosmofobia contient une vingtaine de récits, des nouvelles légères et fluides à la Short Cuts, s’attachant chacune à un personnage emblématique de la mosaïque du quartier madrilène : éducatrices, artistes, dealers, clandestins, actrices, créateurs de mode, Marocains, Guinéens, Espagnols, hétéros et homos se croisent, se rencontrent, s’entraident ou se jalousent, s’aiment, puis se déchirent, sans toutefois se mélanger. Avec son roman choral, Lucia Etxebarria nous livre une comédie humaine attachante et bariolée, bien à l’image de Lavapiés.
Au fil des pages, le puzzle prend forme, les récits se répondent en brossant le tableau impressionniste d’un quartier unique en son genre, mais à l’image de notre monde. Ultramodernes solitudes, métissage, cohabitation pas toujours aisée des cultures, désarroi amoureux, précarité, attraction anxiogène pour l’autre et quête de soi : Lucia Etxebarria nous parle de ce qui fait l’essence de Lavapiés.
Mais, selon la bonne vieille règle de l’art selon laquelle il n’y a rien de plus universel que le particulier, elle nous offre aussi un miroir de nos vies. Car, comme le dit si bien le sous-titre de son roman, les autres sont un « je ». Voilà une idée bienvenue en ces temps de repli sur soi, où de poussiéreux concepts comme celui de l’identité nationale sont remis au goût du jour. L’univers métissé et profondément humain d’Etxebarria nous fait du bien.
Texte : Jean-Philippe Damiani
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