Bonjour,
Je suis PE en fin de contrat de 2 ans à Mayotte. Je n’ai pas demandé le renouvellement. L’expérience de ce recrutement de 60 postes de PE sans spécialité s’est effectué en 2009 puis 2010. Je viens d’apprendre qu’il reprend pour la rentrée prochaine, sans doute suite au déficit très important des enseignants après les émeutes de set-oct-nov 2011.
Je ne cherche pas à décourager les personnes désireuses de venir enseigner ici…seulement les prévenir sur les réalités de terrain qui sont très loin de tout ce qu’on peut imaginer…“surréaliste!!!”, comme l’a souvent répété un psychologue scolaire.
Bref, on est loin des situations presque idylliques des fonctionnements des collèges et lycées qui dépendent du Conseil Général ou du Vice-Rectorat et qui ressemblent à ce que l’on peut trouver en métropole ou autres DOM.
Malheureusement pour nous , les écoles sont sous la responsabilité des mairies…et la plupart des élus ont été ou sont encore des enseignants du 1er degré!!! Pour exemple, nous avons dû exercer notre droit de retrait pour dénoncer la présence de rats dans nos locaux, le manque d’eau (1 robinet pour 500 élèves), les classes non nettoyées car le personnel avait été congédié pendant les vacances et non re-embauché à la rentrée, l’absence de matériel scolaire (cahiers, livres…)malgré les commandes…
En ce moment les parents d’élèves ont décidé de ne plus envoyer leurs enfants à l’école car le feu a pris, mardi dernier, dans les interrupteurs provoquant la panique et un enfant qui a fait un malaise vagal suite à cet événement. Il faut savoir que la commission d’hygiène et de sécurité ne délivre pas d’agrément ici…pour aucune école. les extincteurs sont vides. depuis une dizaine d’année des courriers sont écrits pour réclamer des travaux et on apprend que l’école bénéficie d’une dotation de…0 euros pour travaux!!! Un audit a prononcé la dangerosité des locaux (4 classes à haut risque) mais on nous demande de reprendre les cours…
Les enfants souffrent de malnutrition et leurs parents ne peuvent pas payer la collation…la liste est encore longue…Comme je l’ai dit dans un message à mes amis de métropole “je n’ai plus la foi, je ne sais pas enseigner à des enfants qui ont faim et qui jouent avec des bouts de rats crevés…”
Les collègues mahorais avec qui nous travaillons supportent mal d’être sous-payés par rapport à nous qui avons des primes d’éloignement et les relations s’en ressentent. Pas question d’espérer de travailler en équipe…et de toute façon les horaires denses ( plus de 5h d’affilée) ne le permettent pas.
Les émeutes de l’an dernier ont laissé des traces aussi…Il y a eu beaucoup de violences qui n’ont pas été communiquées…des familles sont parties sans demander leur reste, d’autres ont fait partir femmes et enfant…
En ce moment il y a une polémique sur l’endroit où l’on doit enterrer les naufragés des “Kwasa-kwasa” (canots de fortune où s’entassent les candidats sans papiers (40 environ) à la Terre promise, Mayotte!) et dernièrement on parle de “Kwasa-kwasas orphelins”…c’est à dire des canots où se trouvent uniquement le pilote du bateau…et des enfants…
Voilà un tableau pas très réjouissant…mais si après tout cela vous arrivez à profiter du lagon, tant mieux! Ah oui…les plages ne sont pas très sécures. 2 seulement sont fréquentées par les “mouzoungous” (blancs) Sakouly et N’gouja.
Il vaut mieux être TRES motivés par la prime d’éloignement …c’est un des plus sûrs moyens de tenir…Ceci dit, je me trouve aux côtés des mahorais dont je suis le témoin d’une grande détresse…