Mardi 17 avril 2018
J’étais à Varanasi depuis quelques jours et je devais rejoindre la frontière indo népalaise pour ensuite me rendre à Lumbini, lieu de naissance du Bouddha ; mon train pour Gorakpur, devait partir à minuit.
Vers 21 heures j’ ai pris un touktouk qui mis 1/2 heures pour faire 5 km ; il y avait eu pire.
Arrivée à la gare de Varanasi je vis des dizaines de gens qui dormaient à même le sol, des familles, des groupes…
A l’intérieur, c’était le même spectacle ; il n’y avait presque pas de place pour passer entre les dormeurs. Un grand tableau affichait les horaires en hindi et en anglais mais je ne voyais pas mon train pour Gorakpur Junction. Je me suis dirigée vers un guichet pour me renseigner ; trois jeunes hommes étaient devant. L’un d’entre quand il eu terminé avec le guichetier me demande s’il pouvait m’aider.
Je l’informai de ma destination ; il regarda sur son mobile et me rassura : mon train était bien prévu ; il m’indiqua le quai et me fit savoir que mon train serait à l’heure. Je me dirigeai alors vers le quai 1 ; celui ci était également rempli de gens qui dormaient sur le sol. Je trouvai une place sur un banc ; au bout d’un moment un jeune homme me demanda s’il pouvait s’asseoir ; je lui répondis que le banc ne m’appartenait pas. Il me posa les questions habituelles : d’où je venais …
Tout un groupe de jeunes gens se regroupa autour de nous très curieux de ma présence sur ce quai.
C’est vrai que j’étais la seule touriste. Ils ne parlaient pas l’anglais très bien mais nous arrivions à communiquer ; leur train était à deux heures du matin et il étaient déjà là lorsque je suis arrivée vers 21 h 30 !
De temps en temps des personnes traversaient la voie ferrée, dont un père avec son jeune garçon !
Quelques chiens étaient sur le quai ; ils se faisaient chasser. Ils visaient la nourriture que les voyageurs sortaient de leur sacs. L’un d’entre eux était complètement dépoilé ; j’avais remarqué déjà que les chiens en Inde passaient leur temps à se gratter. Les voyageurs continuaient d’arriver et étendre leurs linges pour dormir.
Vers 22 h 30 j’ai préféré aller confirmer que mon train partait bien du quai 1. Il y avait une file assez importante au guichet ventes des billets. Je suis partie faire un tour à l’extérieur de la gare, mais lorsque je suis revenue, je constatai que la file ne diminuait pas au contraire. Je me décidai alors à faire la queue, mais au lieu de me mettre à la fin, je m’arrêtai au milieu et fit comprendre à un homme qui se trouvait là que j’avais un tout petit renseignement à demander. Il prit mon billet et le consulta mais un policier assis devant me fit signe d’avancer ; puis le guichetier me demanda carrément d’entrer dans leur bureau. Il consulta son ordinateur et m’annonça que mon train avait une heure de retard. Je fus plutôt rassurée : il y avait bien un train pour Gorakpur.
Je suis retournée sur le quai et trouvai une place près d’une dame âgée qui semblait vaincue par le sommeil. Un homme à ma gauche commença à me poser des questions et un autre se joignit à la conversation. Au bout d’un moment, un voyageur écoutant la conversation me dit que lui aussi allait à Gorakpur. Ils tinrent à voir mon billet et me dirent qu’il n’était pas conforme.
En fait j’ai commencé à m’inquiéter lorsque j’ai vu le train en provenance de Dehli bondé mais des gens essayaient d’y entrer quand même. Ce train est reparti les portes ouvertes car elles ne pouvaient pas se fermer à cause des voyageurs qui étaient debout. Ils avaient attaché une corde sans doute pour éviter que quelqu’un ne tombe.
Le monsieur qui allait à Gorakpur me demanda de le suivre au guichet information. L’employé n’a pas su nous renseigner. Tout le monde me conseilla de voir avec le titi,(sans doute TT )- je compris que c’était le contrôleur - pour qu’il me trouve une place. Je commençais vraiment à m’inquiéter.
A 1 h 20, alors que je pensais que le train n’allait pas tarder à ’arriver, un jeune homme me fit voir son portable qui affichait 1h20 de retard pour le train à destination de Gorakpur.
Le quai était noir de monde qui dormait sur le sol. En fait l’un des hommes qui était assis à côté de moi, me fit savoir qu’il était avec un groupe de 24 personnes ; ils étaient venus du sud de l’Inde pour une dizaine de jours à Varanasi ; leur train avait 8 heures de retard, c’est pourquoi ils n’avaient rien d’autre à faire que dormir. Mais pour eux c’était tout à fait normal.
Déjà lors de mon trajet Gaya – Varanasi, les voyageurs indiens étaient amusés par mon étonnement devant leur patience lors de très longs arrêts imprévus . Ils m’expliquaient en souriant que c’était dus à des problèmes techniques. Mon train était arrivé avec 4 heures de retard, mais pour eux 4 heures ce n’est pas du retard.
Finalement, mon train est arrivé à 2 heures. J’ai repéré le titi comme tous le nommaient et lui fit savoir que je n’avais pas de réservation et que je souhaitait payer pour cela. Il me répondit qu’il ne pouvait rien faire pour moi ! Il semblait très affairé.
Je suis entrée dans une voiture au hasard qui se trouvait être une voiture couchettes ; des jeunes gens me voyant déconcertée me firent asseoir sur une couchette qui avait l’air libre. Je m’assis en espérant que personne ne viendrait me déloger ; les autres voyageurs émergeant de leurs sommeil, me regardaient perplexes. Au bout de dix minutes, comme je m’y attendais un homme est arrivé et m’a fait comprendre que c’était sa place.
Je quittai donc la voiture et tombai sur au un autre titi ; je lui expliquai à nouveau que je souhaitais payer mais avoir une place même en première (je devais voyager toute la nuit). Il demanda à voir mon billet et m’annonça que je devais aller dans le wagon « sleeper » (ce qui correspond à la troisième classe). Un jeune homme m’accompagna ; mais lorsque j’atteignis le wagon je fus saisie d’effroi ! Celui ci était tellement rempli de monde que beaucoup de voyageurs étaient debout dans le couloir . J’essayai de monter, mais nous étions debout serrés comme dans une boite de sardine près des toilettes et de la poubelle. Je m’écriai que je ne pouvais pas rester dans ce wagon et ressortis. Le jeune homme qui essayait de me réconforter m’accompagna vers un autre un wagon.
Finalement je me retrouvai dans un wagon à couchettes ; je restai dans le couloir où trois ou quatre voyageurs regardèrent mon billet en essayant de trouver une solution à mon désarroi. Ils discutèrent entre eux ; ils semblaient prendre à coeur mon problème comme s’ils étaient concernés.
Soudain les larmes me montèrent aux yeux, je me voyais mal voyager debout toute la nuit. Dans ce couloir, il y avait une couchette qui était occupée par un homme assis. Il me fit signe de m’asseoir à côté de lui ; je refusai en lui disant qu’il ne pourrait pas dormir mais il insista ; je m’assis. Il y eu beaucoup de passages de voyageurs qui me regardaient curieusement. Les jeunes qui avaient essayé de m’aider avaient dû aller dormir.
J’étais assez gênée d’occuper la couchette de l’homme et en plus je n’étais pas très à l’aise car je ne pouvais pas adosser mon dos ; je repérai un gros ballot de linge blanc (des draps) ; je le mis contre la porte et m’assis dessus ; du coup je n’étais pas trop mal à part la poubelle en face de moi d’où sortaient des cafards. Le voyageur qui m’avait proposé de m’asseoir finit par s’endormir ; un jeune homme vint s’asseoir près de lui et engagea la conversation ; il était vraiment sympathique. Il me demanda si j’étais fatiguée ; je lui répondis que j’étais trop contrariée pour être fatiguée. Il était en train d’écraser une substance dans le creux de sa main qu’il mélangeait à son tabac et il était très jovial.
Le premier titi apparut tout d’un coup et me redemanda mon billet ; il le regarda et me fit savoir que mon billet n’était pas valable. Je lui expliquai que je l’avais acheté dans une agence à Varanasi et que je ne comprenait pas pourquoi on m’aurait vendu un billet non valable !
Au bout d’un moment il m’informa que je devais payer 860 roupies si je voulais continuer à voyager. Je lui répondis que j’étais d’accord pour payer à condition d’avoir une place correcte, il me répondit qu’il n’y aurait pas de problème pour cela. Je l’informai que je payerai en euros car je n’avais plus que quelques roupies indiennes (juste de quoi prendre quelques cafés). Il refusa en me disant qu’il n’avait que faire de mes euros. Il partit et revint accompagné de l’ autre titi avec lequel j’avais déjà eu à faire.
Celui ci me rappela ironiquement que j’avais moi même proposé de payer ; je lui expliquai que j’acceptais de payer mais en euros. Il se mit à rire et refusa mes euros. Il me parla ensuite d’un ami à lui qui pouvait me changer de l’argent à Gorakpur ! Je ne voyais pas trop où il voulait en venir.
Puis il pris ma main et me dit qu’il n’avais pas l’intention de me faire payer car j’étais son amie et que je voyagerai correctement !
Les deux titi chargèrent le jeune homme de me conduire à une place ; il m’emmena à un wagon et m’indiqua une couchette. Les autres couchettes étaient toutes occupées dont une par un homme qui ronfla toute la nuit. Malgré tout, je réussis à m’endormir ; lorsque je me réveillai il faisait jour et je vis des gouttes de rosée perler sur les vitres. Il était six heures du matin , les voyageurs se réveillaient petit à petit . Je pu voir que la couchette au dessus de moi était occupée par une jeune femme.
Au bout d’un moment, un des jeunes gens qui avaient essayé de m’aider vint s’asseoir en face de moi. Nous discutâmes jusqu’à l’arrivée du train à Gorakpour à 9 heures.
Je lui fit savoir que je souhaitais prendre un bus pour Sonauli (frontière indo népalaise) car j’avais l’intention d’aller à Lumbini mais que je voulais prendre un café avant. Il m’aida à porter mon sac et me conduisit dans un café plutôt propre et sympa. Je pris un café et lui en proposait un ; il n’ en voulait pas mais insista pour payer mon café ce que je refusai. Celui ci me parut délicieux sans doute parce que je n’avais rien dans l’estomac depuis la veille.
Puis il me demanda mon billet à l’origine de mes déboire, et téléphona à l’employé qui l’avait vendu ; celui ci lui dit qu’il m’avait avertie que le billet n’était pas valable ! Je trouvais absurde de vendre un billet non valable ! Je n’avais pas compris lorsqu’il me l’avais dit, je pensais juste que je n’avais pas de réservation. Mais lorsque j’avais voyagé de Gaya à Varanasi le train était à moitié vide et je n’avais pas occupé la place attribuée ; je pensais voyager dans les mêmes conditions , c’est pourquoi je ne m’en suis pas inquiété.
Dès que nous sortîmes du café, un chauffeur de taxi m’accosta ; le jeune homme me fit signe en me dissuadant d’accepter la proposition du chauffeur, mais je lui demandai tout de même le prix pour Sonauli ; il me répondit 300 roupies indiennes. Cela me parut correct. Le jeune homme me dit au revoir et partit. Ils étaient trois hommes autour du taxi, celui qui nous avait accosté, qui portait un turban et une barbe ; il ressemblait aux gens du Sahara ; deux autres hommes étaient avec lui. Ils m’installèrent à l’avant et me firent savoir qu’il y aurait une légère attente d’environ 20 minutes car ils devaient attendre qu’il y ait encore quatre autres personnes en plus de moi. Dans un taxi conçu pour 5 personnes ! Je m’exclamai en lui disant que ce n’était pas possible ; il me démontra que ça l’était en retirant le repose tête et en le coinçant entre les deux sièges avant ! Ils éclatèrent de rire devant ma stupéfaction.
Au bout d’une demi heure environ, le barbu et son collègue se mirent courir en direction de la gare : un train venait d’arriver et ils s’en étaient rendu compte trop tard, les voyageurs avaient déjà été accostés par d’autres chauffeurs. Néanmoins, ils suivirent un groupe de 4 personnes avec un nombre de bagages impressionnant ; mais ceux ci avaient l’air de refuser leur offre. Le groupe entra dans le café où j’avais consommé ; le barbu les suivit et les attendit à l’extérieur.
Après un long moment, nous n’étions toujours pas partis ; je commençais à en avoir assez et leur dit que je souhaitais partir en bus. Ils me promirent que des personnes allaient bientôt arriver.
Je retournai prendre un café et une friandise, qui me firent le plus grand bien.
Le groupe de personnes qui était sensé voyager avec nous était en train de se restaurer. Je leur demandai s’ils allaient à Sonauli ; ils me répondirent que oui, mais qu’ils voyageraient en bus.
Je sortis, pris mon bagage dans le taxi et leur fit savoir que je prendrais le bus ; les deux hommes avaient l’air très dépités. Dès que j’arrivai près du bus pour Sonauli, je fus accosté par un employé qui m’annonça le prix : 100 roupies.
Ils mit mon cabas dans la soute, à l’arrière et je montai dans le bus ; les deux premiers sièges étaient libres ; je m’y assis. Un homme et son fils entrèrent ; le père fit installer le garçon à côté de moi et s’installa dans un des sièges parallèles derrière le chauffeur. Puis le bus démarra à grand coup de klaxon.
L’employé qui encaissait s’adressa à l’adolescent assis à côté de moi ; le jeune eu à peine le temps de répondre que son père intervint avec colère. L’employé lui répondait en me regardant de temps en temps ; je compris qu’il voulait faire déplacer l’adolescent et qu’il n’allait tout de même pas faire déplacer une touriste ! Le père ne décolérait pas et intima l’ordre à son fils de ne pas bouger. L’employé renonça et resta debout ; en fait c’était sa place ce qui expliquait qu’elle était libre lorsque je suis montée dans le bus.
Le bus n’arrêtait pas de klaxonner ; cette ville n’était pas différente de la plupart des villes indiennes et le trafic y était aussi insupportable. Finalement la circulation était pire qu’à Varanasi car en plus des voitures, motos, touktouks, rikshaws, il y avait une quantité invraissemblable de camions.
Le bus s’arrêta plusieurs fois dans de petites villes où nous restions bloqués un long moment. Il était poussiéreux, mon pantalon blanc était gris, mes ongles noirs.
Nous arrivâmes à Sonauli où je devais rejoindre la frontière indo népalaise. Mon projet initial était d’aller à Lumbini, mais j’étais épuisée et de plus Lumbini m’éloignerait de Katmandou ; je décidai donc d’aller directement à Katmandou.
Je savais pour l’avoir lu sur les forum qu’ il fallait marcher environ un km pour arriver à la frontière indo-népalaise . Plusieurs rikshaw me proposèrent leur service mais je refusai. Je suivis un cortège qui se dirigeait vers la frontière à pieds. Nous étions en file indienne et avec nos bagages - certains portaient leur bagages sur leur tête – cela me faisait penser à un exode.
Les voyageurs, tous indiens ou népalais, filèrent tout droit lorsque je vis la pancarte indiquant « immigration ». J’interrogeai un policier qui m’indiqua le bureau. Je rentrai ; trois hommes étaient assis derrière leur ordinateur ; je leur tendis mon passeport. Un employé m’informa que je n’avais pas fait tamponner mon passeport par l’immigration indienne. Je lui répondis qu’un policier m’avait indiqué ce bureau. Il m’expliqua qu’il fallait d’abord que je passe à l’immigration népalaise.
Je laissai mon cabas dans leur bureau et ressortis ; je commençais à être assez contrariée. Après m’être adressé aux premiers policiers, je compris qu’il fallait que je retourne à l’endroit où le bus nous avait déposés ! Le trajet sous le soleil caniculaire me parut interminable.
Je trouvai enfin le bureau ; celui ci était enclavé et rien n’indiquait que c’était un poste de douane.
J’étais tellement remontée que je rentrai dans le bureau comme une furie ; cinq hommes étaient tranquillement assis à discuter. Je les incendiai ; je leur fit savoir que j’avais fait l’aller retour jusqu’à la frontière népalaise car rien ni personne n’indiquait qu’il fallait s’arrêter ici ; que personne n’était présent pour nous guider , que ce n’était pas normal …… je leur demandai pourquoi ils étaient tous à l’intérieur et personne dehors pour nous indiquer le bureau qui n’était pas du tout visible de la route.
Ils se mirent tous à rire et l’un deux me dit d’un ton bienveillant qu’il allait à présent m’aider. Un autre me répondit qu’il faisait trop chaud pour rester dehors !
Je tendis mon passeport à l’un d’entre eux. Les formalités accomplies, je repartis mais cette fois ci je pris un rickshaw qui me demanda 150 roupies ; je lui fit savoir que je lui donnerai 100 roupies car ce n’était pas loin.
Je redonnai mon passeport à l’immigration népalaise ; au bout d’un moment, comme je trouvais que c’était long, je lui demandai si je pouvais reprendre mon passeport posé sur la table ; il me répondit que son computer était en panne. J’en eu ras le bol et sortis pour chercher une boisson fraîche , j’étais morte de soif. Sonauli ressemblait à la plupart des villes indiennes avec des étalages de fruits et de légumes au bord des rues principales ; des stands proposant toutes sortes de nourriture.
Comme les boissons qui étaient proposées n’étaient pas fraîches, je décidai d’acheter un bouteille d’eau et repérai une boutique. Deux femmes étaient assises en train de se restaurer ; je leur demandai le prix de la bouteille ; elles me répondirent 25 roupies népalaises. Je leur répondis que d’habitude je la payais 20 roupies ; elles ne voulaient rien savoir. Je sortis deux billets de 10 roupies et cherchai les cinq dans mon porte monnaie mais ne les trouvant pas, je leur tendis alors un billet de 500 en leur disant que je n’avais pas de monnaie. Du coup elles prirent les deux billets de 10 en bougonnant.
Je récupérai mon passeport, et me rendis à l’arrêt des bus pour me renseigner. Après avoir hésité entre aller à Lumbini ou retourner dès à présent à Katmandou, j’avais décidé de rentrer directement à Katmandou.
Un homme me voyant chercher me demanda s’il pouvait me renseigner ; je lui expliquai et il me conduisit au bureau qui vendait les billets. Celui ci se trouvait à l’intérieur d’un bar ; cela tombait bien : j’avais envie de boire un thé ou un café.
A présent je savais que je voulais rentrer à Katmandou mais j’hésitais entre prendre le bus le jour même ou passer la nuit dans cette ville pour me reposer. J’en parlai à l’homme qui m’accueillit dans le bar et il se trouvait que son établissement proposait également des chambres.
Ils me les fit visiter mais celles ci me déplurent : la propreté était plus que douteuse et de plus elles n’avaient pas de fenêtre ; ma décision était prise, j’allais renter dès qu’il y aurait un bus. L’avantage en outre c’est que je voyagerais de nuit ; le prochain bus partait à 16 h 45. Il était environ 15 heures et j’eu le temps de prendre un thé, me reposer dans cet endroit ventilé à l’abri de la chaleur . Le personnel était sympathique, et très intéressé à discuter.
Le trajet jusqu’à Katmandou devait durer 12 heures.
Lorsque ce fut l’heure, l’un des hommes m’accompagna jusqu’à l’arrêt du bus ; mon sac fut mis dans la soute et je m’installai au siège qui m’était attribué. Lorsque le bus démarra, il était à moitié vide ; il s’arrêta à plusieurs reprise pour faire monter des voyageurs, pratiquement toutes les cinq minutes. Peu de temps après qu’il soit parti, des voyageurs descendirent et je compris qu’il allait marquer un long arrêt. Je descendis également. Il était environ 18 h 30 et l’air était très doux.
Après être repartis, le bus commença à rouler sur des routes moins encombrées par la circulation et nous traversions des étendues de champs et de nature ; je me dis que nous allions avoir un voyage tranquille et agréable.
Les voyageurs népalais communiquaient entre eux si aisément et spontanément qu’ils semblaient se connaître. Je trouvais la langue népalaise très harmonieuse et agréable.
A un moment le bus s’arrêta pour prendre des personnes dans une petite ville ; il était environ 19 heures et il faisait nuit. Il y avait une grande agitation ; soudain dans le bus, l’employé qui discutait avec deux jeunes derrière mon siège éleva la voix de plus en plus. Je me retournai ; visiblement ils étaient en train de se disputer. Tout à coup, il saisit un des jeunes par le col pour le déloger de son siège ; des personnes intervinrent ce qui évita la bagarre.
Un petit jeune à côté de moi m’expliqua que certaines personnes n’avaient pas de tickets et donc ils payaient sur place et n’avaient pas de place réservée.
Le bus s’arrêta longtemps ; l’employé faisait sans cesse changer les voyageurs de sièges ; d’ailleurs juste après le départ du bus il m’indiqua un autre siège mais je lui répondis que je souhaitais rester à ma place car je craignais d’être sur la roue ce qui me rendrait malade ; en fait j’avais la place n° 6 mais du côté gauche ; il n’insista pas.
Mon voisin changea quatre fois. L’un d’eux commercialisait des produits bio près de Katmandou et me donna une brochure . Je fus étonnée lorsqu’il m’apprit qu’il était chrétien, et s’appelait David. La plupart des népalais avaient des traits tibétains et il n’échappait pas à la règle. Il me parla de son frère décédé en Afghanistan alors qu’il combattait au sein de l’armée française.
A un moment je m’assoupis et lorsque j’ouvris les yeux de nombreux voyageurs étaient debout dans le couloir du bus. Mais la plupart avaient prévu un petit banc en bambou pour s’asseoir. Il était environ 21 heures et le bus devait arriver à Katmandou vers 6 heures du matin ! L Je trouvais étonnants ces népalais qui voyageaient dans des conditions aussi difficiles et trouvaient cela tout à fait normal.
Le bus s’arrêta régulièrement dans des petites villes afin que les gens puissent s’alimenter ou boire ou autre. Je ne voulais ni boire ni manger pour ne pas être embêtée par ma vessie ou mes intestins.
D’ailleurs depuis la veille je n’avais que deux ou trois petits gâteau dans l’estomac en plus des cafés ; et aussi un concombre à Varanasi dans la journée avant de prendre le train.
Mon voisin changea à nouveau et un petit homme à l’allure d’un sherpa, s’installa à côté de moi . A un moment après m’être assoupie, je me sentis écrasée contre la vitre du bus par un poids. Mon voisin qui s’était endormi était assis le genou plié de tel façon que sa hanche gauche débordait sur moi. Je pris ma bouteille d’eau, la mis entre nous de façon à marquer la séparation et fis en sorte qu’il se réveilla pour rectifier sa position.
Il n’avait pas l’air de se soucier de mon espace vital car j’ai passé des heures à préserver celui ci avec ma bouteille d’eau. De plus , au mépris des gens qui dormaient, il allumait de temps en temps son mobile pour écouter de la musique à fond. J’avais l’impression qu’il le faisait exprès pour m’embêter, parce qu’il avait remarqué mon agacement à son égard.
Le voyage était interminable et contrairement à ce que je pensais, la route était loin d’être tranquille, bien au contraire. Des kilomètres de camions devant et derrière nous, et dans l’autre sens également ! Un vrai cauchemar. Nous sommes à de nombreuses reprises restés bloqués entre des camions qui ne cessaient de klaxonner comme si cela allait se débloquer plus vite.
Pour couronner le tout, nous roulions au bord des ravins ; tout le long, des pancartes invitaient à rouler prudemment. C’était vraiment la route de l’impossible !
Après un énième arrêt, mon voisin a dû demander à son ami , David, de changer de place car il avait remarqué mon manège avec la bouteille d’eau. Il posa une question à David en me regardant et celui ci répondit « Katmandou ». Il lui a sûrement demandé « où va cette personne si insupportable » ?
Du côté de l’espace vital cela allait mieux, mais la jeune femme qui était derrière moi avait laissé la fenêtre ouverte, et il faisait très froid à cette heure de la nuit au Népal. Je sentais l’air sur mon oreille gauche. J’essayai de fermer cette fenêtre mais elle restait bloquée à 15 centimètres environ. Je n’arrêtais pas de tirer pour la débloquer ; puis le compris que la dame avait accroché une bouteille à la fenêtre et c’est ce qui bloquait la fermeture. Elle voyait bien mes tentatives mais ne faisait rien pour m’aider en enlevant son thermos. A force d’acharnement, je finis par arriver à détacher la bouteille qui tomba ; j’entendis la dame parler à son voisin , qui se trouvait être mon ancien envahisseur.
Tout cela m’a beaucoup occupée, et à un moment je vis les nombreuses lumières d’une cité. Je compris que nous arrivions à Katmandou. Je regardai l’heure, il était 4 heures du matin ; nous étions partis à 17 heures la veille. Nous arrivions un peu plus tôt que prévu, mais nous avions mis 12 heures pour parcourir 200 kilomètres.
A Sonauli, le monsieur qui m’avait vendu le billet de bus avait indiqué à l’employé l’endroit où je devais descendre le plus près de mon hôtel. Je pris mes bagages et il m’indiqua la direction de l’hôtel. Il faisait froid à cette heure et les rues étaient presque désertes. Je cherchai un taxi car l’hôtel n’était pas tout à fait à côté, ; j’en repérais un et lui demandai de me conduire à Paknajol ; il me répondit que cela ferait 200 roupies ; cela me paraissait beaucoup car je savais que c’était vraiment très près. Je lui dis que je lui paierai 100 roupies ; il fit un peu la moue mais me conduisit. En effet, c’était à trois minutes mais je lui donnai 150 roupies…
La guest house où j’avais résidé à mon arrivée au Népal 15 jours auparavant avait l’air fermé ; mon inquiétude était grande de rester dehors dans le froid ; je demandai à haute voix s’il y avait quelqu’un. A mon grand soulagement Bikace un adorable employé ouvrit la porte ; il m’aida à rentrer mon sac.
Je lui fis savoir que je souhaitais déjeuner car je n’avais pas mangé depuis trois jours ; il était désolé mais à cette heure de la nuit il ne pouvais me proposer que du café ou du thé. Une grosse envie de pleurer me saisit ; cela faisait plus de 30 heures que j’étais dans les transports et j’avais l’impression d’être un zombie, je ressentais une grande faiblesse.
Il vit mon désarroi et s’empressa de m’apporter des petits biscuits népalais confectionnés par sa maman. Je ne les trouvais pas très bons, durs et pas très sucré, mais c’était mieux que rien en attendant un vrai déjeuner qu’il pourrait me servir vers 8 heures ; néanmoins je luis dis qu’ils étaient délicieux.
Il m’indiqua ma chambre où je pus prendre une douche très chaude car j’avais eu très froid. Je me sentais bizarre, très faible et envie de pleurer, mais en même temps je me disais que personne ne m’avait imposée ces épreuves.