Yémen, des hauts plateaux à la mer Rouge
Dans les villages perchés des hauts plateaux
Dans les environs de Sanaa, les paysages de montagne sont parmi les plus beaux
du Yémen. Muni d’une autorisation obligatoire pour circuler en dehors de la
capitale, et accompagné d’un guide et d’un chauffeur de 4x4, la découverte des
hauts plateaux et des djebels est un émerveillement. À 15 km de la capitale,
c’est un premier choc visuel à la vue du Dhar Al-Hajjar, le palais du rocher,
devenu l’édifice symbole du pays. Perché sur un piton de grès rouge, cet ancien
palais d’été de l’imam Yahya, aujourd’hui transformé en musée, défie les lois
de la pesanteur. On a l’impression qu’il tient en équilibre alors qu’il épouse
parfaitement la forme du rocher sur lequel il est bâti... Une vraie merveille
architecturale et une prouesse technique digne des plus grands ingénieurs !
La salle de méditation et de prière de l’imam, au dernier étage du palais, domine
toute la vallée. En continuant la route du Wadi Dhar, puis celle du Wadi Dulla,
alternance de cultures en terrasses et de plateaux rocailleux, deux villages,
Thilla et Kawkaban, situés à environ 50 km de Sanaa, méritent le détour.
Avec ses murailles restaurées, ses citernes à ciel ouvert, ses façades en dents-de-scie
et ses vieilles maisons juives, Thilla a le charme des villes de l’arrière-pays.
Cité nichée au pied d’une forteresse imposante, elle est parsemée de ruelles
étroites, de passages discrets entre les maisons de plusieurs étages, dont les
façades traduisent tout le savoir-faire des bâtisseurs yéménites. À quelques
kilomètres de là, le village de Kawkaban, à près de 3 000 m d’altitude,
est perché au sommet d’une falaise abrupte. Fief des Zaïdites depuis le XIIe siècle,
cette citadelle de pierres est cerclée d’une immense muraille défensive. Une
route en asphalte, construite récemment et très pentue, sillonne à travers les
montagnes pour y accéder. Du haut de cette citadelle, la vallée fertile, alternance
de cultures en terrasses et de champs en jachère, permet d’admirer toute la
beauté sauvage du Yémen. Kawkaban surplombe aussi la vieille ville de Shibam
et sa grande mosquée, situées juste en contrebas de la falaise.
Plus à l’ouest, au cœur du djebel Haraz, Manakha et Kahel donnent un autre aperçu
de la majesté des hauts plateaux. On y accède par l’une des premières routes
construites au Yémen, sur l’axe Sanaa-Hodeïda. Cette voie historique traverse
des montagnes découpées, des pentes sculptées de terrasses et une végétation
tropicale. Sur les bas-côtés de la route, on peut apercevoir des villageoises
portant des jerrycans sur la tête ou encore des Yéménites, la Kalachnikov en
bandoulière, la joue gonflée par le qat, une feuille légèrement narcotique
qu’ils mâchent à longueur de journée. Après 90 km, la ville de Manakha
apparaît enfin au-dessus de l’horizon. Située à 2 200 m d’altitude
et fief des Ismaéliens, Manakha est aujourd’hui le point de départ de nombreuses
randonnées dans la région. Plus haut, perché sur une falaise, le village de
Kahel est une petite perle architecturale, avec ses maisons-tours qui servent
de rempart naturel et ses cultures en terrasse aux alentours.
Texte : Julien Nessi
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