Alaska, la dernière frontière
Coup de chaud sur les glaciers
Inutile d’aller bien loin, pourtant : la nature est partout. Où que le regard se tourne, les montagnes s’empilent. Le Wrangell-St Elias National Park regroupe à lui seul neuf des seize plus hauts sommets américains. Et cache, en son sein, une bonne centaine de glaciers. Qui dit mieux ? Plus loin, l’Alaska Range est couronné par le phare du mont McKinley, point culminant de l’Amérique du Nord (6 194 mètres). Ailleurs, quelques glaciers se laissent même observer en drive-through. Ainsi du fameux Portage, à moins d’une heure d’Anchorage. On se gare face à la lagune glaciaire, semée d’icebergs qui fondent peu à peu avec l’été. Mais quelque chose manque... Et le glacier alors ? À huit kilomètres, recroquevillé au fond de son réduit.
Ce n’est plus un retrait, c’est une véritable retraite. Une débâcle. Plus méridional que le Groenland, plus chaud, l’Alaska fond plus rapidement. Partout, les glaciers se subliment. Deux fois plus vite qu’il y a cinq ans. Dans le Prince William Sound, le Toboggan Glacier n’atteint déjà plus la mer ; ils sont des centaines dans ce cas, repliés en amont. Sur la rive, les bleus intenses ont laissé la place à une couche morne de débris ; conifères, aulnes, saules s’installent. Quelques exceptions confirment la règle : le Harvard Glacier, lui aussi dans le Sound, a avancé. Né plus en altitude, dans une température de congélateur, il n’a pas encore souffert de la hausse des températures. A contrario, certains glaciers portés sur les vieilles cartes du US Geological Survey se sont totalement évaporés.
Corollaire de la fonte, la terre, libérée d’une partie de la masse colossale des glaces, se relève — plus vite que la mer ne monte. Prenez ce drôle de golf implanté à l’orée de Glacier Bay : il y a 50 ans, ses terres étaient submergées par les grandes marées ! Le proprio, pragmatique et pas mécontent, imagine déjà ouvrir neuf nouveaux trous d’ici à quelques années...
Texte : Claude Hervé-Bazin
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