Carlitos qui êtes aux cieux
Auteur : Fernando Vallejo
Editeur : Éditions Belfond
164 Pages
Attention, livre remuant ! Fernando Vallejo, l’enfant terrible de la littérature colombienne révélé en France avec La Vierge des tueurs, poursuit sa chronique hallucinée de la réalité particulièrement chaotique de son pays.
Inspiré d’une histoire vraie, Carlitos qui êtes aux cieux raconte trois années de la vie d’un village colombien nommé Matesis. Avec un style enlevé et savoureux, souvent truculent et débordant, Vallejo retrace l’incroyable destin de son frère Carlos, qui fut élu maire de la ville. Un premier édile des plus iconoclastes, amateur de belles lettres et de beaux garçons, dont le mandat se termina en drame. Car, en Colombie, terre baroque par excellence si l’on en croit Vallejo, la bouffonnerie n’est jamais loin de la violence.
À la fois très drôle et désenchanté, Carlitos qui êtes aux cieux est également une charge acerbe contre la politique colombienne qui, sous la plume de Vallejo, apparaît bien folklorique. Sans doute jumelé avec le Macondo de Cent ans de solitude, Matesis est bien entendu la métaphore du pays tout entier. Ici, les morts votent à tour de bras, les suffrages s’achètent pour trois fois rien, les menaces minent la démocratie et l’indigence guette le peuple.
La situation est grave, mais pas désespérée, semble nous dire Vallejo. Car, plus qu’un pamphlet brûlant, Carlitos qui êtes aux cieux évoque une sarabande volcanique et endiablée en forme d’hymne à la vie. Cette vie, qui est aussi (et surtout) une fête à Matesis. Pensez donc, on peut mourir demain… Mieux vaut prendre le parti d’en rire, à l’unisson avec les nuées de perroquets moqueurs sortis de l’imagination de Vallejo, qui survolent le territoire des FARC en les affublant de noms d’oiseaux.
Texte : Jean-Philippe Damiani
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