Brasilia, capitale ex nihilo

Brasilia, capitale ex nihilo
© Florian Amon-Clement

Chaque année, le 21 avril, Brasília célèbre l’anniversaire de sa fondation. La capitale brésilienne est née d’un pari fou : construire au milieu de nulle part une ville nouvelle qui abrite le gouvernement et les administrations centrales du Brésil. Que l’on aime ou que l’on déteste Brasília, cette ville de deux millions et demi d’habitants est unique au monde. Retour sur un chantier pharaonique et sur une métropole mal-aimée qui mérite quand même un (grand) détour.

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Brasília a-t-elle bien vieilli ?

Le 21 avril prochain, Brasília aura pratiquement un demi-siècle d’existence. Comme chaque année, la capitale fédérale du Brésil célèbrera son anniversaire avec une série de manifestations culminant dans la soirée sur l’Esplanada dos Ministerios, en plein cœur de la ville, avec un feu d’artifice et le concert de Chiclete com Banana, l’un des groupes stars de la pop musique bahianaise, l’Axé.
Disons-le franchement : Brasília a mal vieilli, malgré tout le respect que nous devons à son architecte, Oscar Niemeyer. Certains de ses immeubles, à l’époque, futuristes (tendance Le Corbusier), ressemblent désormais aux grands ensembles démodés de nos banlieues. Le gigantisme de la ville n’est pas des plus engageants : les quartiers sont éloignés les uns des autres, personne ne se balade dans les rues, car tout le monde prend la voiture ou le bus.
Autour de la capitale, il n’y a que les terres arides de l’inhospitalier sertão brésilien. La grande ville la plus proche, Belo Horizonte, se trouve à dix heures de bus. Il vaut donc mieux se rendre à Brasília en avion. Une ville à fuir, alors ? Non, plutôt une curiosité à découvrir lors d’un voyage au Brésil, un témoignage d’une folie architecturale peut-être dépassée, mais unique en son genre.

Un rêve prométhéen

Brasília est née d’un rêve : construire dans le cœur défavorisé du Brésil une capitale flambant neuve, symbole de la puissance du géant sud-américain. En 1956, le président Juscelino Kubitschek décide de transférer la capitale dans le sertão afin de coloniser cette terre aride, de développer l’intérieur du pays et de désengorger la région de Rio de Janeiro (l’ancienne capitale). Le chantier est confié à l’architecte Oscar Niemeyer et à l’urbaniste Lúcio Costa.
L’œuvre est titanesque : les premiers bulldozers et sacs de ciment doivent être parachutés. Des dizaines de milliers d’ouvriers défrichent des milliers de kilomètres carrés et créent un lac artificiel de 42 km de long ! Le chantier dure quatre ans : Brasília est inaugurée le 21 avril 1960, pour la fête de Tiradentes, un révolutionnaire brésilien qui s’insurgea contre les Portugais au XVIIIe siècle. Tout un symbole !

Une ville symbole

De fait, Brasília elle-même est un symbole : celui de la ténacité du peuple brésilien déterminé à dompter les éléments pour se construire un futur. La devise du pays « ordem e progresso » (ordre et progrès) s’inscrit dans la lignée de la philosophie positiviste du XIXe siècle à l’origine de la révolution industrielle. Le plan de la ville évoque la forme d’un avion, icône de la modernité dans les années 1960. Au centre, l’axe des grands monuments publics (sièges du gouvernement, de la présidence, du congrès, cathédrale…). De part et d’autre, deux grands axes routiers rappellent les ailes d’un avion avec, à leur intersection, la gare routière. Enfin, autour de ces axes, s’étendent en un quadrillage parfait les immeubles d’habitation, mais très éloignés les uns des autres.
Cette volonté de gigantisme fait toutefois l’effet d’une dispersion, d’une ville éclatée, d’un chantier sans fin. En 2006, on y inaugurait encore des bâtiments, comme la bibliothèque et le musée d’Histoire, tous deux conçus par… Niemeyer !

Une ville à échelle humaine ?

Ville symbole, certes, mais ville humaine ? Au départ, les fonctionnaires quittent Rio de Janeiro à contre-cœur, mais avec un salaire doublé. On peut les comprendre… Dans les années 1960, Brasília ne rime pas avec dolce vita. Certes, chacun des ensembles d’habitation possède son parc, son école, son église, sa poste et ses commerces pour le plus grand confort des habitants. Mais il n’ y a alors ni théâtre, ni cinéma à Brasília où la vie culturelle est proche de zéro : on ne construit pas une sociabilité ex nihilo, surtout avec des résidents venus s’installer contre leur gré. On travaille et on s’ennuie ici, malgré une qualité de vie bien plus grande qu’à São Paulo, cœur économique du Brésil.
Depuis ces années-là, Brasília s’est, en outre, considérablement étendue. Conçue à l’origine pour 400 000 personnes, la ville compte aujourd’hui près de 2,5 millions d’habitants. Autour de son centre gigantesque, aux loyers prohibitifs (accessibles aux fonctionnaires et aux cadres), s’est développée une périphérie avec de nombreux bidonvilles où s’entassent les laissés-pour-compte de la société brésilienne. Le rêve futuriste brésilien s’est, à Brasília comme partout ailleurs, heurté à la triste réalité d’une société parmi les plus inégalitaires du monde.

Allez-y pour Niemeyer !

Faut-il alors aller à Brasília ? Oui, car non seulement cette capitale exprime le caractère prométhéen de la nation brésilienne, mais aussi parce qu’elle est l’œuvre d’un architecte visionnaire au style inimitable : Oscar Niemeyer, aujourd’hui centenaire, qui continue encore à exercer son art. Il conçoit actuellement un autre projet d’envergure à Cuba.
Homme de gauche convaincu, exilé pendant la dictature des généraux, Niemeyer est un monstre sacré au Brésil. Son style lyrique et poétique se caractérise par l’utilisation de la courbe, qui exprime liberté et sensualité. Une courbe qui, selon Niemeyer, se retrouve dans les paysages brésiliens, plages, cours d’eau et collines…
Peut-être est-ce finalement pour cela qu’il faut aller voir Brasília : pour y déchiffrer, derrière un aspect un peu froid et gigantesque, cet esprit courbe et sensuel, qui s’exprime à merveille dans la Catedral metropolitana ou les coupoles du Parlement, et qui caractérise le Brésil vu par le génial Niemeyer…

Pour en savoir plus

Programme des festivités de 2008
www.lastfm.fr/event/534645

Site de l’office du tourisme de Brasília
www.setur.df.gov.br

Site du patrimoine mondial de l’Unesco sur Brasília
whc.unesco.org/fr/list/445

Site de l’organisation des villes du patrimoine mondial avec de nombreux liens concernant Brasília
www.ovpm.org/fr/bresil/Brasília

Interview très intéressante d’Oscar Niemeyer dans L’Express du 21/11/2007
www.lexpress.fr/mag/arts/dossier/architecture/dossier.asp?ida=461868

Site de la compagnie aérienne brésilienne TAM qui dessert Brasília et propose un intéressant Brazilian Airpass pour visiter le pays
www.tam.com.br

Texte : Jean-Philippe Damiani

Mise en ligne :

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