En Ukraine, dans les pas de Balzac et de Conrad

15 mars 1850 : mariage à Berditchev

15 mars 1850 : mariage à Berditchev
Olivier Page

« Il n’y a que dans ce pays que les mirages prennent vie » songe Balzac. Il est temps d’épouser son amante chérie. Sa santé se dégrade de jour en jour. Frappé par des malaises cardiaques dus au diabète, l’écrivain ne peut plus soulever un bras. Il marche difficilement. Chaque mouvement lui coûte. Balzac est arrivé au sommet de sa gloire d’écrivain, au prix d’un travail titanesque qui l’a propulsé dans l’Olympe des plus grands créateurs, au mépris de son pauvre corps. Ewa sait qu’il est condamné et qu’il ne vivra pas longtemps, comme en témoigne une de ses lettres à son frère.

Le 14 mars 1850, la ville de Berditchev, couverte de neige, se blottit au pied d’une antique forteresse transformée au XVIIe siècle en couvent des Carmes. Les cloches de l’église Sainte-Barbe annoncent aux habitants (des Ukrainiens, des Polonais et des Juifs, ces derniers formant presque le tiers de la population) de la petite ville un heureux événement. Du froid, et de la pluie fine en plus ! Aidé par son serviteur Thomas, Balzac monte dans la berline. À chaque cahot de la voiture entre le château et l’église catholique Sainte-Barbe de Berditchev, il étouffe, il geint, il murmure la tête sur l’épaule d’Ewa : « Mon pauvre loup-loup, je mourrai avant de vous avoir donné mon nom ! ». Il ajoute : « Je suis fou…de bonheur, garde-moi bien ! ».

Entourés de leurs témoins, la cérémonie de mariage se déroule dans la discrétion. J’imagine les deux époux échangeant leurs alliances devant le prêtre catholique, après 18 ans d’attente. Les mariés rentrent alors à Verkhovnia. Le mois d’avril passe. Le 24 avril 1850, monsieur et madame de Balzac prennent la route de Paris. Le dégel n’étant pas commencé, ils empruntent des chemins épouvantables. « Ce n’est pas une fois mais cent fois que nos vies ont été en danger… Un pareil voyage use la vie pour 10 ans… » écrit-elle à sa fille Anna.

Le soir du 21 mai, au terme d’un périple qui a duré presque un mois, ils arrivent éreintés au domicile de l’écrivain, rue Fortunée à Paris (en haut des actuels Champs-Elysées, aujourd’hui rue Balzac). L’écrivain au bout du rouleau dépérit de jour en jour. Laxatifs, saignées n’empêchent pas les fréquentes syncopes. Il garde le lit. C’est le début d’une agonie, affreuse. Victor Hugo, qui a toujours loué son génie, le veille jusqu’au dernier souffle. Il est à l’article de la mort. « Messieurs, l’Europe va perdre un grand esprit ».

Dans la nuit du 18 août 1850, Balzac s’éteint dans son lit d’acajou. Il a 51 ans. « Atteindre le but en expirant comme le coureur antique ! Obtenir celle qu’on aime au moment où l’amour s’éteint » : c’était une des phrases prémonitoires de Balzac dans un de ses romans (Albert Savarus)…

Texte : Olivier Page

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