Balade hivernale en Sibérie

Irkoutsk – Moscou en Transsibérien

Irkoutsk – Moscou en Transsibérien
Claude Hervé-Bazin

Ce soir, nous quittons Irkoutsk. Wagon 7, compartiment 1 du Baïkal. Sur la tablette, un bouquet de fleurs en plastique bleu regarde le quai. Toujours à l'heure, le Transsibérien s'ébranle à 16 h 42, pas une minute de moins, pas une de plus. Moins d'une heure plus tard, notre provodnika, notre hôtesse de wagon, vient nous installer matelas et draps. Elle s'appelle Irina et a des amis en Australie. Elle aime la France et voudrait aller à Paris.

Nous nous réveillons avec l'aube. Par la fenêtre, givrée aux encoignures malgré la chaleur du train, s'étend un infini enneigé de bouleaux et de pins. De loin en loin, des hameaux, des villages, avec leurs maisonnettes de bois aux cheminées fumantes et aux toits meringués, leurs palissades de bois ceignant des petits jardins endormis, leur pagaille de fils électriques, leurs sovkhozes abandonnés. Un instant, sur le chemin longeant la voie, trois hommes avancent péniblement avec leur fardeau de petit bois.

10 h 30. Première escale de vingt minutes à Krasnoïarsk. Première occasion de descendre du train sans risque de le voir partir, de faire quelques courses. Sur les quais, les vendeuses des kiosques se terrent derrière des ouvertures à peine plus grandes que celles des boîtes à lettres. Les wagons restent, mais la locomotive change - tous les 300 à 400 km environ. Pendant ce temps, comme toutes ses collègues, Irina se glisse sous le train pour frapper à la hache les essieux pris dans une gangue de glace.

Le temps passe, au rythme du roulis et du tangage. L'heure n'a plus guère d'importance : les horaires mentionnent l'heure de Moscou, on ne peut que s'y perdre. Le mieux est encore de l'oublier. Les paysages, les villes, les arrêts défilent, de moins en moins fréquents. Omsk, Nazivaïevskaïa, Ichim, Tioumen (la ville du pétrole), Ekaterinbourg, que tout le monde désigne encore sous le nom de Sverdlovsk, même sa gare… Nous progressons dans un silence tranquille, à peine entrecoupé par les incursions d'Irina, lorsque le ménage lui laisse le temps d'échanger quelques paroles. Du matin au soir, du soir au matin, elle n'a de cesse, avec sa collègue qui la relaie toutes les douze heures, de briquer le couloir, les toilettes, les vitres… Rien n'échappe à sa fougue, pas même le sol de notre cabine, qu'elle aspire deux fois par jour !

Deux jours se sont écoulés, déjà. Au kilomètre 1 770, une grosse borne blanche, entrevue par la fenêtre, signale la limite entre Asie et Europe. Durant la nuit, le train franchit tranquillement l'Oural, virage après virage.

Il est 16 h 52, pas une minute de plus, pas une de moins, lorsque le train entre en gare de Moscou. Irina repart le soir même pour Irkoutsk. 5 152 km d'une fantastique traversée à l'échelle d'un continent.

Texte : Claude Hervé-Bazin

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