La Dignité du peuple : un voyage en Argentine, la vraie

La Dignité du peuple  : un voyage en Argentine, la vraie
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Après Mémoire d’un saccage, le cinéaste argentin Fernando Solanas signe avec La Dignité du peuple, qui sort le 27 septembre, un saisissant documentaire sur l’Argentine d’après la crise de 2001. Réalisé à partir des portraits d’hommes et de femmes qui luttent pour s’en sortir, ce film radical nous fait découvrir l’Argentine telle qu’elle est vraiment. Dévastée certes, mais aussi pleine d’espoir, la tête haute…

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Un pays dévasté par l’ultra-libéralisme

C’était il y a dix ans, autant dire un siècle… L’Argentine faisait l’envie de toute l’Amérique latine. Dirigé par le sémillant Carlos Menem, le « bon élève du FMI » appliquait à la lettre le catéchisme ultra-libéral avec la bénédiction de Washington et des institutions monétaires internationales : privatisation totale du secteur public et des secteurs vitaux de l’économie (eau, électricité, gaz…), licenciements de dizaines de milliers de fonctionnaires, parité forcée entre le peso et le dollar, hausse des taux d’intérêt et libéralisation des échanges extérieurs… L’Argentine était une sorte de laboratoire économique.
Résultat de l’expérience : en 2001, l’économie argentine se retrouve entièrement entre les mains de multinationales étrangères, l’État est en cessation de paiement, le chômage touche 25 % de la population, plus d’un Argentin sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté, cent personnes par jour meurent de faim, les salaires sont bloqués et la classe dirigeante, totalement corrompue, place son argent à l’étranger.
En décembre 2001, le ministre de l’Économie décide de geler les comptes des petits épargnants pour rembourser les dettes abyssales des banques. La classe moyenne, étranglée et appauvrie, n’en peut plus. Le 19 décembre, les Argentins se révoltent enfin, provoquant la chute du gouvernement. Des milliers de commerces sont mis à sac et les quartiers des grandes villes sont dévastés. L’Argentine sombre dans un chaos dont elle commence à peine à émerger.

L’Argentine, la vraie

Comment l’Argentine, ce pays si riche, en est arrivée là ? En 2004, Fernando Solanas, l’un des grands du cinéma argentin (Le Sud ; L’Heure des brasiers), répondait à cette question toute simple avec un documentaire magistral, Mémoire d’un saccage, salué par un Ours d’Or d'honneur au festival de Berlin. Ce pamphlet faisait la démonstration implacable des ravages sociaux de l’ultra-libéralisme. Solanas accusait Menem et les élites argentines de corruption. Les multinationales et les organismes internationaux qui ont dépecé l’Argentine n’étaient pas non plus épargnés.
Avec La Dignité du peuple qui sort en salles le 27 septembre, Solanas propose une « suite » à Mémoire d’un saccage. Et il faut voir ce film pour connaître l’Argentine d’aujourd’hui, la vraie, qui ne se limite pas aux cartes postales de la Boca ou du Perito Moreno. Ce magnifique documentaire choral et engagé nous entraîne à la rencontre de ces Argentins qui ont tout perdu. Réalisé entre 2001 et 2005, La Dignité du peuple rend la parole à ces nombreux exclus (plus d’un Argentin sur deux en dessous du seuil de pauvreté et sans couverture sociale), qui ont su relever la tête et combattre la misère avec le système D. Pour retrouver leur dignité, qui rime avec résistance et solidarité.

Au cœur du chaos

À travers les portraits de Martin, Silvia, Gustavo ou de Carola, La Dignité du peuple retrace donc la lutte exemplaire du peuple argentin aux prises avec un chaos économique et social qui nous paraît effarant, sinon effrayant. Que voit-on de l’Argentine du début du XXIe siècle ? Un maître d’école payé 800 pesos par mois pour enseigner à des enfants qui crèvent de faim ; des cantines populaires où deux oignons servent à faire une soupe pour 300 personnes ; des hôpitaux dans un état de délabrement total faute de financement public, aux couloirs envahis par les déchets et occupés par les clochards, où l’on prend rendez-vous pour une opération six mois à l’avance ; des gens vivant dans des taudis sans eau, ni électricité, aux pieds des gratte-ciels rutilants de Buenos Aires.

« Le peuple uni ne sera jamais vaincu. »

Heureusement, les Argentins font preuve d’une incroyable énergie vitale. Car le pays se reconstruit, malgré tout, et sans être trop aidé par sa classe dirigeante. Ainsi, les blocages de route par les camps de piqueteros ont fait plier le pouvoir à plusieurs reprises. Des centaines d’usines et d’entreprises, que les propriétaires ont abandonné en 2001, sont reprises par leurs employés dans un système d’autogestion, en inventant un modèle économique alternatif. Des expropriations sont combattues avec succès au tribunal par des campesinos qui entonnent à tue-tête l’hymne argentin, empêchant ainsi les ventes aux enchères des terres saisies.
Le président Nestor Kirchner, élu en 2003, a fait quelques réformes « sociales » (fin des lois d’impunité, renégociation de la dette, renforcement du Mercosur…). Toutefois, en sortant de La Dignité du peuple, on se dit que le salut du peuple argentin ne viendra que de lui-même. Car ce documentaire, qui dresse un constat aussi accablant que triste du désastre argentin, s’achève sur une note d’espoir. « Avec mon film, j’ai voulu révéler les petites victoires des laissés-pour-compte, les actions solidaires qui démontrent comment ce monde peut être changé », confie Fernando Solanas. Deux autres documentaires (Argentina latente et La Tierra Sublevada) sont d’ores et déjà en préparation. Ils complèteront la fresque du peuple argentin en lutte.

¡ El pueblo unido jamas sera vencido !

Pour en savoir plus

Le film

La Dignité du peuple (La Dignidad de los nadies)
- Réalisateur : Fernando Solanas
- Scénario : Fernando Solanas, Alcira Argumendo
- Montage : Juan Carlos Macias, Martin Subira
- Durée : 2 heures
- Sortie le 27 septembre 2006 dans une trentaine de salles en France, dont le MK2 Beaubourg, le Reflet Médicis et les 7 Parnassiens à Paris.

À voir sur le web

- Site officiel de Fernando Solanas : www.pinosolanas.com.
- Le DVD de Mémoire d’un saccage.

Texte : Jean-Philippe Damiani

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